< Le grand cirque des belles "petites phrases" de la Ve République. >
<--Présentation -->
Le grand bal des menteurs menteurs commence. Pour la dixième fois dans l’histoire de la 5ème république, les promesses se mettent en ordre de marche pour les élections présidentielles. Les mots sont aiguisé et prêt à faire mouche pour abattre l'adversaire mais aussi conquérir l’électeur.
Ce sont eux qui permettront à l'un ou l'autre des candidats de l'emporter le 7 mai prochain. On se souviendra de la formule du président du Conseil constitutionnel Yves Guéna, ouvrant la campagne officielle en 2002 : « les fauves sont lâchés : »
Il y a bien des façons de raconter les campagnes présidentielles de la 5ème république. J’ai choisi de sélectionner les boutades, les piques d’attaques, les vacheries, les jeux de mots sanglants ou grinçant, parfois
féroces, grossiers, subtils ou insultant et qui ont tous pour but de provoquer le rire ou le sourire, l’émotion ou l’enthousiasme, mais aussi et surtout de conquérir le poste suprême, être président de la république « le Commandeur des Français ».
En 1964 lors d'une conférence de presse, le général de Gaule est invité à annoncer sa candidature à la présidentielle, il répond ironiquement: "Vous savez bien que je ne vous répondrai pas à ce sujet ...On verra bien. Il faut que vous puissiez faire des pronostics."
Deux jours avant le deuxième tour des élections présidentielles, le général de Gaulle s'adresse aux Français (Allocution du 17 décembre 1965): "La République nouvelle a son président, c'est moi. Me voici tel que je suis, je ne dis pas que je sois parfait, et que je n'aie pas mon âge. Je ne prétends nullement tout savoir et tout pouvoir[...].Il m'a été donné par l'histoire de réussir certaines entreprises[...]. Françaises, Français, voilà pourquoi je suis prêt à assumer de nouveau la charge la plus élevée, c'est-à-dire le plus grand devoir. Vive la République, vive la France !"
Le centriste Jean Lecanuet se veut le candidat de la jeunesse, son affiche réclamant " Un Président jeune pour une France moderne". il invite le général de Gaule à quitter le pouvoir: "L’Élisée ne doit pas être la maison de l'orgueil, de la solitude, voire du machiavélisme, mais celle du dialogue."
"Nous gardons le bateau, mais nous changeons le pilote".
1965: Jean-Louis Tixier-Vignancour candidat d'extrême droite, s'amuse à renvoyer De Gaule et Pétain dos à dos, déplorant que: " la France a toujours eu un faible pour la gérontocratie "
1965: Marcel Barbu, il se veut le candidat des petits, des sans-grade: "mes amis mes frères et étant donné mon niveau social, j'oserais presque dire mes copain. "
Les journaux se moquèrent de lui et de son air triste à pleurer, il renchérit:" il a été état de mon air de chien battu...Je suis effectivement un chien battu, et battu depuis cinquante-huit ans!"
29 novembre 1965: il n'en concentre pas moins ses attaques sur le général de Gaule: " Mon général, je voudrais tant vous voir éviter le sort du maréchal Pétain[...] Mon général, vous avez faim de l'amour des français [...] Les Français vous admirent, mais ils ne vous aiment pas mon général."
François Mitterrand candidat à l’élection présidentielle de 1965 n'hésite pas à discréditer le général de Gaule: « nous avons tous entendu le général de Gaule dire, proclamer, affirmer: "Ce sera moi ou le néant". Et d'une certaine manière, s'il est élu, ce sera, à une correction près: ce sera lui et le néant».
Au second tour lors de son allocution du 17 décembre 1965, François Mitterrand expose ses raisons de ne pas voter pour le général de Gaule. : « Gambetta incarna un grand moment de notre histoire, et Clemenceau aussi. Et le général de Gaule incarna, nul ne l’oublie, il y vingt-cinq ans, la résistance de notre pays. Mais ni Gambetta, ni Clemenceau ne songèrent jamais à confisquer le profit de leurs batailles pour la survie de la France au bénéfice d’une politique personnelle[...]
Qui donc disait que la France ne serait rien sans lui ? Non, le général se trompe. La France ne lui appartient pas. La France ne s’identifie à personne d’autre que son peuple.
Marcilhacy soulève un amusant paradoxe :" Il y a 56% d'opposantau général de Gaule, c'est ce qu'a dit le premier tour. Il y a 55% d'opposant à une politique de gauche, c'est ce qu'exprime le second tour..."
Le général de Gaule devient le premier Président de la République de notre histoire élu au suffrage universel, masculin et féminin.
<-- Election présidentielle 1969 -->
L'élection présidentielle de 1969, est la seconde élection de ce type (suffrage universelle direct) sous la Cinquième République. Le lundi 28 avril 1969, le général de Gaulle président de la république annonce sa démission depuis Colombey-les-Deux-Eglises : "Je cesse d'exercer mes fonctions de président de la République. Cette décision prend effet aujourd'hui à midi."
Pour cette édition présidentielle, sept candidats s’alignent sur la grille de départ.
Louis Ducatel, ancien résistant, entrepreneur et élu rappelle Marcel Barbu de 1965 en plus optimiste . Il s’autoproclame "président-citoyen" dans son discours: " Mais pouvez-vous sérieusement penser, que ceux qui viennent aujourd'hui vous faire de belles promesses, seront capable d'accomplir demain, ce qu'ils ont été incapable de réussir hier[...] J'honore et je considère, les hommes politiques qui gagnent leur vie en faisant leur métier et qui en plus, pour servir leur idéal, consacrent leurs efforts à la gestion des affaires publiques.Mais je méprise comme vous, ceux qui viennent de la politique, qui vivent de la politique et surtout ceux qui , n'ayant pu réussir leur vie, prétendent mener les affaires du pays. C'est ainsi que je me présente à vous aujourd'hui, j'aspire à être un président citoyen..."
Le bouillant jeune trentenaire Michel Rocard, secrétaire général et candidat du parti socialiste unifié, se veut le candidat de l'avenir du socialisme. Ouest-france le qualifie de "pur-sang fougueux". Il exprime avec fougue sa lutte pour :"la sécurité sociale, les congés payés, la suppression des zones de salaire même, que de longue, que de dure grève, il a fallu les imposer. Et cela continuera, c'est partout et toujours, la lutte qui arrache et la loi légalise, après, voilà pourquoi et comment, le socialisme est un combat."
C'est la première fois qu'un candidat trotskiste, Alain Krivine, se présente à l'élection présidentielle.Le candidat n'a cessé de de torpiller l'élection:
Les élections sont une telle duperie que même des travailleurs s’apprêtent aujourd'hui à apporter leur suffrage au candidat Poher.
Le pouvoir aujourd’hui, n’est pas dans les urnes, il se trouve dans les conseils d’administrations.
L’état n’est pas neutre. Mais l’outil spécialement forgé depuis des années, pour mener la politique de la bourgeoisie […]
Mais pendant qu’on amuse la galerie en la faisant jouer au tiercé électoral, qu’en est-il des luttes ouvrières ?[...]
Gaston Defferre (SFIO) dès le 17 mai 1969 avec la prise de parole de son futur premier ministre Pierre Mendès France qui vise le bilan de George Pompidou :«Quand on pense que le niveau de vie le pouvoir d'achat a ainsi stagné depuis des années je dis, qu'il ne devrait pas y avoir un salarié en France qui vote, pour les hommes qui sont responsables de cela.
Quand on pense au piétinement du logement, de la construction, je dis, qu'il n'y a pas un mal logé en France, qui devrait voter pour ceux qui sont responsable de cela.
Or je sais bien vous l'avez dit tout à l'heure Defferre ; monsieur Pompidou nous annonce que tout vas changer et que demain il fera le contraire de ce qu'il a fait hier. Mais ce qu'il a fait hier, nous continuons à subir des effets. »
Jacques Duclos secrétaire général et candidat du Parti communiste français. Meeting de campagne électorale, à Boulogne Billancourt le 22 mai 1969 :"La bourgeoisie de notre pays, qui ne met jamais tous ses oeufs dans le même panier, présente en somme deux candidats qui sont des cousins germains, si ce n'est des frères siamois. Il s'agit des deux P : M. Pompidou et M. Poher. D'ailleurs, ils sont si proches l'un de l'autre qu'ils se reprochent réciproquement de se voler leur programme."
Alain Poher (centriste) président du sénat devenu président de la République par intérim après la démission du général de Gaule se sent pousser des ailes:
17 mai 1969 : "Il ne faut absolument pas, à l'avenir, que notre pays, soit la panache de personne ni d'un clan ni d'un autre […] je veux être un président pour tous les français."
30 mai 1969 : "les Français sont un grand peuple, et ils savent que ceux qui parlent le plus, ne sont pas toujours ceux qui travaillent le mieux"
Georges Pompidou dans ses mémoires "Lettres notes et portraits, 1928-1974, de Georges Pompidou", Le portrait le plus rude de ce livre, c'est assurément celui du centriste Alain Poher. Le courant n'est jamais passé entre les deux adversaires du second tour de la présidentielle de 1969, s'ajoute une réelle antipathie personnelle entre les deux hommes. « Quel interprète il aurait fait du rôle de Tartuffe ! », écrira Georges Pompidou. « J'ai rarement rencontré quelqu'un d'aussi dissimulé, de plus tortueux, de plus assoiffé d'honneurs et prêt à tout pour les obtenir », ajoute le successeur du Général qui pointe en particulier son « hypocrisie odieuse » durant l'intérim de 1969. « Quand on l'attaque en force, il s'aplatit, on ne le voit ni ne l'entend plus. »
Le bon de l'abstention au second tour du fait de la consigne du PCF de refuser le choix entre deux candidats.Le PCF a alors beau jeu de la qualifier de " "président au rabais". La conclusion la plus caustique vient d'Italie, et du journal II Popolo : "L'électorat français, qui a refusé trois ans à de Gaule, en accorde sept à pompidou"!
<-- Election présidentielle 1974 -->
Au soir du 2 avril 1974, la France apprend que le président de la République Georges Pompidou vient de disparaître. Le 27 mars, il déclara aux ministres, lors de ce qui devait se révéler son dernier conseil, à propos de sa maladie et de ceux qui l'enterraient déjà : « J'ai le ferme espoir d'embêter tout le monde. (1) » Six jours plus tard, il était mort. L'ironie du sort voudra que Poher revienne à la présidence de la République pendant le mandat de Pompidou: après le décès de ce dernier, Poher, toujours à la tête du Sénat, devient président par intérim pour un mois et 23 jours cette fois. Le premier tour est marqué par un nombre record de douze candidats (ce qui a justifié par la suite une modification des règles de présentation : on passe en 1976 de 100 à 500 parrainages nécessaires pour être candidat).
(1)Lettre du Président Georges POMPIDOU : Notes prises par Edouard BALLADUR, Secrétaire général de la présidence, lors du Conseil des ministres du 27 mars 1974